JACQUES CHEMINADE

« 50 000 emplois ont été supprimés dans l’hôpital public depuis 2002 »

Chaque mois, Jacques Cheminade répond à une interview en direct sur sa chaîne YouTube. Le 9 février, lors du quatorzième épisode du « Dialogue avec la Nation », le candidat à la présidentielle a alerté sur la situation de l’hôpital public qui aurait connu, selon lui, 50 000 suppressions de postes depuis 2002. D’après les rapports annuels de la fonction publique, les effectifs sont, au contraire, en hausse.

 

LE CONTEXTE

Le 9 février, Jacques Cheminade, le candidat à l’élection présidentielle du « Dialogue avec la Nation », était en direct sur sa chaîne YouTube pour répondre aux questions des internautes. Un exercice qu’il répète une fois par mois. Lors du quatorzième épisode, il a dû répondre à une question d’un internaute qui l’interpellait sur « la saturation des urgences », les « fermetures de petits hôpitaux » et la « diminution du nombre de médecins généralistes ». Le candidat répond alors : « En général, il faut sauver la sécurité sociale. La santé n’est pas une marchandise financière. C’est un droit, nous avons été exemplaires, nous ne le sommes plus. Il faut sauver la sécurité sociale. » Avant d’ajouter : « Sauver aussi l’hôpital public, parce que l’on a créé une politique de réduction d’emplois et de lits dans l’hôpital public, y compris Marisol Touraine, ce qui est inadmissible ; 50 000 emplois je crois depuis 2002. »

L’EXPLICATION

Chaque année, le ministère de la fonction publique publie des rapports annuels qui permettent notamment de prendre connaissance de l’évolution des effectifs des trois fonctions publiques : d’Etat, territoriale et hospitalière. On peut y trouver des données exprimées en équivalent temps plein (ETP), c’est-à-dire non pas le nombre de salariés, mais le nombre de postes, sachant qu’un poste peut parfois être occupé par plusieurs salariés employés à temps partiel.

On apprend ainsi que l’effectif total de la fonction publique hospitalière (FPH) – chiffre qui correspond au « total hôpitaux » (uniquement les médecins et le personnel non médical) et aux emplois des établissements d’hébergement pour les personnes âgées et des structures médico-sociales – n’a cessé de croître. Il a progressé pour passer de 921 830 emplois ETP en 2004 à 1 075 517 en 2014.

Quant aux chiffres du sous-ensemble « total hôpitaux » (uniquement les médecins et le personnel non médical), auxquels semble se référer plus particulièrement Jacques Cheminade, ils sont eux aussi en hausse. De 805 902 ETP en 2002, ils sont passés à 953 203 en 2014. Ils ont seulement connu une légère diminution entre 2012 et 2013, avec 3388 ETP en moins, la seule en douze ans.

Reste que la situation est peut-être amenée à évoluer différemment au cours des prochaines années. En effet, en 2015, le gouvernement a annoncé la suppression de 22 000 postes d’ici 2017, soit 2 % des effectifs. La raison ? L’État souhaite réduire ses dépenses notamment dans les hôpitaux publics, à hauteur de trois milliards d’euros, dont 860 millions provenant de la « maîtrise de la masse salariale ». Pour le moment, la série de chiffres publiée par la fonction publique s’arrête en 2014.  Et donc, à ce stade, il est impossible d’évoquer, comme le fait Jacques Cheminade, une diminution des effectifs au sein de l’hôpital public.

 

Un nombre de lits réduit   

Par ailleurs, le candidat à la présidentielle fait référence à la réduction du nombre de lits. D’après le rapport du ministère des Affaires sociales et de la Santé publié en 2016, les capacités d’accueil en hospitalisation à temps complet (comptées en lits), ont été réduites au profit des hospitalisations à temps partiel (sans nuitée et comptées en place). En 2014, 411 000 lits d’hospitalisation à temps complet dans les établissements de santé ont été enregistrés, soit une baisse de 57 000 lits en onze ans. « En contrepartie, les capacités en hospitalisation à temps partiel se sont développées pour atteindre un total de 73 000 places en 2014 », affirme le rapport en évoquant la forte hausse des soins dispensés en ambulatoire. Jacques Cheminade a donc raison sur ce point.

Nous avons contacté l’équipe de campagne de Jacques Cheminade à propos des chiffres que celui-ci avance sur les effectifs de l’hôpital. Elle nous a indiqué que le candidat s’était appuyé sur un article de L’Humanité, publié en 2013 et qui, lui-même, citait Frédéric Valletoux, le président de la Fédération hospitalière de France (FHF), grand porte-parole du secteur. L’article mentionne en effet que 50 000 emplois seraient alors supprimés entre 2008 et 2014. Mais la FHF affirme n’avoir jamais fait de déclaration officielle sur ce chiffre, totalement démenti par les données des rapports annuels de la fonction publique.

Apolline Merle

Les sources à consulter