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LE METAVERS

Une révolution en cours

Horizon Worlds est le jeu de réalité virtuelle développé par Meta.
Photo : Prunelle Menu/EPJT Dessin et montage : Coline Poiret/EPJT

Le mot métavers est dans toutes les bouches. Accessible via les nouvelles technologies, le monde virtuel intéresse de plus en plus les ingénieurs, les publics ou encore les marques qui l’utilisent pour booster leurs actions de communication. Le métavers est si désirable que tout le monde tente de se l’approprier pour engager sa révolution numérique. Mais est-il vraiment révolutionnaire ?

Par Prunelle Menu et Honorine Morel-Jean

Le métavers est un monde numérique parallèle à notre environnement physique. Une sorte de cyberespace. Pour certains géants des nouvelles technologies, comme Mark Zuckerberg et Satya Nadella, respectivement P-DG de Facebook et de Microsoft, le métavers va révolutionner Internet. Pour marquer les esprits, le grand patron de Facebook a même renommé son entreprise Meta le 28 octobre 2021.

Souvent associé aux casques de réalité virtuelle, le métavers ne se limite pas à ces derniers. Il peut aussi être accessible via de nouveaux types d’écran, des hologrammes ou des lunettes de réalité augmentée. Grâce à l’outil de son choix, l’utilisateur peut passer d’un monde numérique à un autre de manière extrêmement simple et rapide et y interagir avec d’autres usagers.

Créer son avatar dans un univers 3D

Le métavers va plus loin dans notre expérience des réseaux sociaux et du divertissement en ligne. L’objectif : une immersion totale. Le sentiment de présence réelle doit être le plus fort possible. Dans cet environnement numérique, pas question d’endosser le costume de personnages inventés par d’autres. L’utilisateur invente sa propre histoire, une vie parallèle à celle qu’il vit IRL (in real life, dans la réalité).

Facebook mise tout sur le métavers. La société souhaite recruter 10 000 employés, notamment des ingénieurs, dans l’Union européenne avant 2027. Il faut aussi rappeler que l’entreprise a racheté Oculus VR, une société spécialisée dans les équipements de réalité virtuelle, dès mars 2014. En décembre 2021, Facebook a concrétisé son projet en lançant Horizon Worlds, aux Etats-Unis et au Canada. Chaque internaute peut créer son avatar dans un environnement en 3D. Il se comporte à l’intérieur de ce dernier comme il le fait dans la vie réelle mais avec d’autres internautes présents dans des espaces physiques différents : faire du shopping, jouer, travailler, participer à une réunion en visioconférence, etc.

Une technologie qui ne fait pas l’unanimité

Si les entreprises qui s’emparent du métavers sont nombreuses, les expériences qu’elles proposent sont diverses. La Metaverse fashion week a par exemple été organisée du 24 au 27 mars 2022 sur la plateforme de réalité virtuelle Decentraland, développée par la fondation du même nom. Le quartier commercial de Decentraland abrite déjà des magasins qui vendent des collections virtuelles de Tommy Hilfiger, de Franck Muller ou encore d’Elie Saab.

Cependant, notre connaissance du métavers reste limitée car la révolution du métavers, à supposer qu’il y en ait une, est en cours. Nous savons quelles entreprises investissent dans ce nouveau marché et ce qu’elles souhaitent y créer mais la plupart des projets n’ont pas encore abouti. Par ailleurs, le métavers ne fait pas l’unanimité. Pour beaucoup de spécialistes du numérique, il ne fait que proposer la même expérience qu’Internet mais de manière un peu plus captivante qu’en 2D. Ils pointent du doigt le fait que le Web tel qu’on le connaît actuellement convient parfaitement pour beaucoup de nos usages et que la plus-value du métavers se situe seulement sur une petite partie de nos activités.

 

 

Le métavers pose de nombreuses questions. Par exemple, quid des règles juridiques en vigueur dans ce nouveau monde ? Une utilisatrice d’Horizon Worlds a déclaré avoir été victime d’un « viol collectif virtuel » dès l’arrivée de son avatar dans le métavers. Dès lors, peut-elle porter plainte ? Peut-on ouvrir une enquête dans l’univers virtuel ? Les agresseurs peuvent-ils être jugés comme dans la vie réelle ?

Et puis, il y a bien sûr l’incontournable problème de l’utilisation des données. Les entreprises auront accès à des informations intimes, comme l’émotion ressentie par les joueurs, à travers leur avatar. Ces nouveaux capteurs, capables de sonder le joueur dans ses réactions face au jeu, peuvent alimenter une forme de « marketing émotionnel ».

Finalement, la condition d’un univers virtuel a minima réussi est que les perceptions (sensationnelles et émotionnelles) soient aussi vraies que possible. Mais qu’apporte-t-il de plus à la réalité ? La marque Heineken a annoncé le 21 mars 2022 qu’elle sortait une nouvelle bière, uniquement sur le métavers. La Heineken Silver aurait un goût « d’une grande quantité de pixels, [avec] un soupçon de code informatique et beaucoup de nuits de programmation ».

En cherchant à assimiler sensations de la vie réelle et innovation technologique, le métavers ne semble pas révolutionner grand chose, pour l’instant.

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