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Guerre à Gaza

L’Unrwa fragilisée par Israël

Depuis les attaques du 7 octobre perpétrées par le Hamas, une bataille menée par Israël contre l’Unrwa complique l’aide au Gazaouis. Illustration : Victoria Mullot

Malgré les conclusions de l’audit qui lave l’Unrwa des soupçons de complicité avec le Hamas, depuis le 7 octobre, Israël multiplie les attaques contre l’agence pour les réfugiés palestiniens. Pourtant son action est considérée comme indispensable.

 

Par Marie-Mene Mekaoui et Nahomie Perigny
A Jérusalem-Est, les bureaux de l’Unrwa, l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, ont fermé après avoir été la cible d’un incendie, jeudi 9 mai. L’attaque a été perpétrée par de « jeunes extrémistes israéliens », affirme l’organisation onusienne. Aryeh King, maire adjoint de la ville sainte annexée illégalement depuis 1967 selon l’ONU , s’est félicité de cet attentat qui a, selon lui, pour but de « débarrasser sa ville d’une organisation nazie ».

Après les attaques du 7 octobre menées par le Hamas contre Israël, les tensions sont intenses entre l’État hebreu et l’agence onusienne pour les réfugiés palestiniens. Israël a multiplié invectives et attaques contre l’Unrwa. Le 18 janvier, lors d’une rencontre avec des responsables israéliens, Philippe Lazzarini, commissaire général de l’Unrwa, apprend l’« implication  supposée » d’employés lors du 7 octobre. Le 27 janvier, Israël accuse publiquement une douzaine d’employés de l’agence onusienne de complicité avec le Hamas. Mais l’Unrwa, dont 99 % de ses 13 000 employés sont Palestiniens, a anticipé. La veille, l’agence déclarait diligenter une enquête et  licencier les mis en cause. 

L’État hébreu « doit encore apporter la preuve » de ces allégations. C’est la conclusion du rapport publié lundi 22 avril, après un audit présidé par l’ancienne ministre des Affaires étrangères française, Catherine Colonna. « Nous avons reconnu que l’Unrwa dispose de plus de mécanismes pour assurer sa neutralité que ce que possèdent les autres agences onusiennes et qu’elle a un rôle vital pour des millions de personnes », a-elle déclaré.

Le rapport juge l’organisme international « irremplaçable et indispensable » aux Palestiniens. Il suggère aussi une cinquantaine de recommandations. Parmi ces dernières, il incite à renforcer le profilage des candidats à l’embauche et de contrôler davantage les structures de l’agence afin d’éviter leur détournement par des groupes armés. « Le secrétaire général de l’ONU [Antonio Guterres] a accepté toutes ces recommandations », a confirmé le porte-parole des Nations unies, Stéphane Dujarric.  

Depuis sa création en 1949, l’Unrwa tente d’apporter une aide aux millions de réfugiés palestiniens, principalement installés au Moyen-Orient. Réalisé par Nahomie Perigny/Epjt

L’État hébreu a critiqué les conclusions de l’audit. « Le Hamas a si profondément infiltré l’Unrwa qu’il n’est plus possible de déterminer où l’Unrwa s’arrête et où commence le Hamas », a fustigé le porte-parole de la diplomatie israélienne. 

Cet amalgame a eu de réelles conséquences dans l’action humanitaire menée par l’agence onusienne dans la bande de Gaza depuis la réplique sanglante d’Israël. Celle-ci a coûté la vie à 35 000 Gazaouis, dont plus de 12 000 enfants.

En février, le conseiller général de l’Unrwa, Philippe Lazzarini, tirait déjà la sonnette d’alarme dans une lettre publiée sur X. « C’est avec un profond regret que je dois aujourd’hui vous informer que l’Agence a atteint un point de rupture, avec les appels répétés d’Israël à son démantèlement et le gel des financements de donateurs face à des besoins humanitaires à Gaza sans précédent. »

Israël refuse de légitimer le rôle de l’Unrwa notamment parce que l’agence encouragerait le droit au retour. Vidéo Nahomie Perigny/ Epjt

Alors que l’agence est principalement financée par des États donateurs, seize d’entre eux, dont les cinq plus importants, ont arrêté de verser leurs subventions, pour un total de 413 millions d’euros, après les accusations lancées par Israël. Depuis, certains les ont repris, sauf le principal bailleur, les États-Unis. Malgré la satisfaction du porte-parole du département d’État américain après la publication de l’audit, le pays ne risque pas de reprendre sa contribution d’aussi tôt. En mars, le Congrès américain a adopté l’interdiction du financement de l’Unrwa pendant un an.  

De son côté, l’Unrwa espère que le rapport Colonna permettra aux États, qui ont stoppé ou freiné leur subvention, de reprendre leur financement. icon_circle slelected icon

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