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Vladimir Poutine

La répression à tout prix

Vladimir Poutine a réformé deux fois la constitution pour se maintenir à la présidence de la Russie. Photo : Service de presse du président de la Russie

Vladimir Poutine a prolongé son mandat à la tête de la Russie pour six ans après sa victoire lors de l’élection présidentielle de mars 2024. Traques d’opposants et répressions se sont multipliées pour qu’il puisse se maintenir au pouvoir pendant vingt-quatre ans.

 

 

Par Axel Monnier et Baptiste Villermet
L​a Russie est-elle une démocratie ? Depuis 2000, Vladimir Poutine n’a cessé d’accroître son pouvoir sur son pays. Fin du nombre limité de mandats consécutifs, allongement de la durée de ceux-ci et autoritarisme auront fait de lui un président que seule la mort semble pouvoir déboulonner.

Entre le 15 et le 17 mars, le président russe a brigué un cinquième mandat. Résultat sans appel, c’est une victoire au premier tour avec 88 % des voix. Mais l’élection a été marquée par les répressions de plus en plus dures et la mort, quelques jours plus tôt, de son principal opposant, Alexeï Navalny.

Réalisé par Axel Monnier et Baptiste Villermet/EPJT

Face à un dirigeant aussi imposant, les opposants ne sont pas nombreux. Le principal adversaire de Poutine a longtemps été Alexeï Navalny, avocat et militant politique. Il tente en 2018 de se confronter à Vladimir Poutine lors de l’élection présidentielle, mais à cause d’une accusation puis une condamnation pour détournement de fonds en 2013, la Commission électorale centrale de la fédération de Russie refuse sa candidature. Cette commission fera de nouveau parler d’elle en 2024 : elle rejette pas moins de six candidatures. 

En 2020, l’opposant est empoisonné au Novitchok, un agent neurotoxique. Plongé dans le coma et hospitalisé en Sibérie, il est transporté à Berlin par une ONG pour recevoir de meilleurs soins. Problème, il est sous contrôle judiciaire en Russie qu’il n’avait donc pas le droit de quitter. Alors de retour dans son pays, en janvier 2021, il est emprisonné.

Le Novitchok a été inventé en URSS et la Russie est régulièrement mise en cause dans des empoisonnements avec ce produit. Les Russes nient utiliser un tel agent. Mais très vite, le Kremlin est accusé d’avoir voulu faire taire Navalny.

L’opposition au régime de ce dernier l’entraineront vers d’autres procès. Il est condamné notamment pour extrémisme. Un mot fourre-tout que le droit russe n’explicite pas et qui permet des condamnations arbitraires. Il rejoint alors les 82 autres prisonniers politiques que le pays compte dans ses prisons. Envoyé dans une colonie pénitentiaire en Sibérie, il y décédera à 47 ans, le 16 février 2024, un mois avant les élections. 

Assassinats, procès montés, condamnations exagérées…, les autorités russes mettent tout en œuvre pour museler l’opposition et traquer les opposants. Le 12 mars, un proche de Navalny, Leonid Volkov, est agressé devant sa maison à Vilnius, en Lituanie.  L’ONG russe Memorial qui a lancé le projet « Soutien aux prisonniers politiques », dénombre chaque année les prisonniers politiques et les prisonniers religieux. En 2022, dernière année de son bilan, elle en a compté 122.

Infographie réalisée par Axel Monnier/EPJT

Le 27 février, le militant russe Oleg Orlov, figure de la lutte en faveur des droits de l’homme, est condamné par un tribunal à Moscou à deux ans et demi de prison. Il a été reconnu coupable d’avoir « discrédité » l’armée russe.  Il est l’un des vétérans de l’ONG Mémorial, colauréate du prix Nobel de la paix en 2022 et dissoute par la justice russe en décembre 2021. Dans une dernière prise de parole, il dénonçait, « l’étranglement de la liberté » en Russie et « l’entrée des troupes russes en Ukraine ».

Le régime de Vladimir Poutine réprime lourdement les manifestations. Depuis l’invasion de l’Ukraine en février 2022, la répression s’est encore intensifiée. Selon un rapport d’Amnesty International, de 2023, plus de 20 000 Russes en seraient victimes en raison de leur positionnement anti-guerre. 

Pour les funérailles d’Alexeï Navalny, le 1er mars 2024, plusieurs milliers de Russes se sont rassemblés pour lui rendre hommage dans le cimetière moscovite de Borissovo ainsi que dans d’autres villes du pays. Les autorités avaient dans un premier temps mis en garde contre toute manifestation « non autorisée » avant de laisser les rassemblements se dérouler. Mais selon une ONG russe, au moins 67 personnes auraient été interpellées par les autorités.

Cette répression a encore de beaux jours devant elle. Le 7 mai 2024, Vladimir Poutine a prêté serment pour un cinquième mandat. Il sera à la tête de la Russie jusqu’en 2030, date de la prochaine élection présidentielle à laquelle il pourra se présenter si Dieu lui prête vie. Pour l’heure, aucune réelle opposition ne se dégage. 

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